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Shadow (Part.2) - Épisode 8
– Non, non, non ! objecta l'homme qui tâtonnait dans la pénombre à la recherche de son Stetson. C'est pas vrai, ça ! Juste au moment où on allait tomber d'accord.
Le mastodonte au-dessus de la jeune femme était trop lourd. Impossible, aussi agile fut-elle, de mettre la main sur son arme. Tout en essayant de maintenir les crocs de la bête à distance, elle lui envoya plusieurs coups de coude à la mâchoire, dont un qui parvint à déstabiliser le prédateur un court instant, juste le moment de répit dont elle avait besoin pour mettre la main sur l'une des flèches de son carquois.
– Ttttt... je ne ferais pas ça si j'étais vous. L'homme au Stetson, qui avait récupéré l'arbalète tombée lors de l'attaque, tenait en joue la jeune femme qui continuait de se débattre sous les grognements de la bête.
– Mais qu'est-ce que vous faites ?! Dès que cet animal en aura fini avec moi, à qui croyez-vous qu'il s'en prendra ?
– « Cet animal... », vous êtes dure, là ! Vous allez le vexer. Groot, lâche... la dame ! La bête tourna sa gueule vers l'homme au Stetson, un regard circonspect presque implorant qui rappelait clairement ses origines. Après tout, on ne leur avait pas donné le nom d'« infectés » sans raison. Chacun des monstres qui peuplait désormais ce nouveau monde avait eu une vie, des rêves, des sentiments, même. Et s'il restait en eux que très peu de cette humanité aujourd'hui, le fait est qu'ils avaient été des hommes.
– Ça suffit Groot, on a fini de jouer. Je t'ai dit de la lâcher !
La bête répondit par une série de grommellements avant de se retourner vers la femme et lâcher un dernier grognement, comme ultime bravade. Puis elle finit par obtempérer, s'écartant de sa proie.
L'homme tendit la main à la jeune femme pour l'aider à se relever. Celle-ci fit mine d'accepter son bras mais en une fraction de seconde se saisit de l'arbalète restée dans son holster. Les trois protagonistes se tenaient désormais debout au centre de la pièce, la belle et la bête, un carreau pointé sur le visage. Se sentant menacé, l'infecté se mit à grogner de plus belle, les crocs en évidence.
– Ça suffit ! On reste cool, intervint l'homme.
– Mais vous avez pété les plombs ou quoi ?! Je vais mettre une flèche dans la tête de ce monstre !
– Je crois pas, non.
– Mais merde ! C'est un infecté ! Vous voulez finir comme lui ?
La bête ne cessait de grogner, se montrant toujours plus menaçante.
– Du calme, Groot ! Vous voyez, vous êtes en train de nous l'énerver. Allez, baissez votre arme, je vais tout vous expliquer.
– Mais... vous parlez à cette chose ?
– En quelque sorte, oui. Rangez votre arme, je vous dis. On vous veut pas de mal. Ensuite, on pourra reprendre notre petite discussion et je vous conduirai à votre proie. C'est bien ce que vous voulez, non ?
La main de la jeune femme tremblait ; elle semblait lutter contre elle-même. Comme si un autre conflit, plus profond, plus dur, se jouait dans son propre psyché. L'homme s'en rendit compte. Il s'approcha d'elle précautionneusement.
– Regardez, je baisse mon arme. Je sais que vous voulez retrouver cet infecté. Mais vous avez besoin de moi pour ça.
Son ton était calme et posé, ses mots choisis avec soin et son débit ininterrompu. Il continuait d'avancer vers elle. Plus que quelques centimètres les séparaient désormais. Comme il l'avait déjà fait précédemment, il posa la main sous l'arbalète pointée vers son compagnon. Mais cette fois, cela ne se passa pas vraiment comme prévu. Il reçut un violent coup de coude dans les dents qui le fit reculer de trois bons pas. L'infecté, prêt à bondir sur la femme, fut stoppé net par un carreau qui égratigna sa gueule pour finir sa course dans le mur, à un centimètre de sa gueule.
– Hey ! Mais je vous ai rien fait, moi ! protesta l'homme, se massant la mâchoire d'une main et tenant de nouveau en joue l'inconnue de l'autre.
La femme, dont la main ne tremblait plus, appuya sur un bouton bordant la crosse de son arme et une nouvelle flèche vint se loger dans la saillie, prête à jaillir.
– OK, vous allez me conduire, dit-elle, relevant son arbalète avant de la ranger délicatement dans son holster.
– On a donc un accord ?...
– Si je le trouve à l'endroit que vous m'indiquerez, vous aurez votre pognon, sinon, je vous planterai une flèche entre les deux yeux.
– C'est bon Groot, laisse la tranquille. Il semblerait que la dame et nous ayons un petit bout de chemin à faire ensemble.
Alors qu'il rassemblait ses affaires, l'homme s'arrêta net. Il récupéra l'arbalète posée sur sa paillasse et la tendit à sa nouvelle coéquipière, ancrant ses yeux dans les siens. Ils s'observèrent un bref instant avant qu'elle accepte l'arme qui lui était rendue et la glisse dans son holster.
– Bon, eh bien, je suppose qu'il est temps de faire les présentations. Moi, c'est Red et le grincheux, là, c'est Groot.
– Vous lui avez donné un nom ?
– Ben, c'est plus facile pour discuter.
– Mais... C'est un infecté... un animal !
Groot se mit à grogner de nouveau d'un ton menaçant.
– Alors, primo, si vous voulez qu'on fasse un bout de chemin ensemble, il va falloir arrêter de vous montrer irrespectueuse avec mon ami. Et deuzio, lui n'est pas un infecté comme les autres. Quand je l'ai trouvé, il venait tout juste de se faire mordre. Je lui ai donné les médocs que j'avais sur moi. Vous savez, la petite pilule bleue, et au bout de quelques jours, le virus a cessé de proliférer.
– Mais c'est impossible ! Ces pilules n'ont aucun effet sur une personne déjà contaminée.
– Pourtant, ça a fonctionné sur lui. Groot comprend ce qu'on dit. Il pense comme nous, a des émotions...
– Des émotions ? Mais qu'est-ce que vous racontez ?! Ce sont des parasites, incapables de réfléchir ou même de penser... Il faut les éradiquer tel le virus qui les a transformés.
– Chuuut... tempéra l'homme, s'assurant que son acolyte, assis dans un coin de la pièce, n'avait pas entendu la remarque de la jeune femme. C'est justement ce que je suis en train de vous expliquer. Lui est différent. Et surtout, il a un caractère de cochon et une force herculéenne. Alors, parlez moins fort !
– Même si ce que vous dites est vrai, pourquoi serait-il plus fort que les autres ?
– Aucune idée. La seule chose que je peux vous dire, c'est qu'il m'a déjà sauvé la mise un nombre incalculable de fois et que dans une bagarre, il en vaut bien une dizaine comme lui.
– Si vous le dites !
– Bon, et vous, vous ne m'avez pas dit ? (La femme lui lança un regard circonspect) C'est quoi votre petit nom ? On s'est présentés, à votre tour !
– Sh... Appelez moi Shadow.
– Bon, eh bien... Shadow, je crois qu'il est temps d'y aller. Je vous emmène à l'endroit où j'ai vu votre infecté. Vous êtes gentille d'essayer de ne pas nous tuer d'ici là, OK ?
– Je ne vous garantis rien, dit-elle, précédent Red en direction de la sortie. Vous pouvez demander à votre... animal de se pousser de la porte ?
Groot fit ce qu'il savait faire le mieux : il grogna.
– Bon, ben, c'est pas gagné... Au moins, elle ne t'a pas encore planté une flèche dans le cou ! fit-t-il à l'adresse de son compagnon.
– Allez, en route ! lança-t-elle, s’apprêtant à ouvrir la porte de la grange
– Non, pas par là ! Il y a une vingtaine d'infectés à l'int...
Trop tard. La jeune femme traçait déjà son chemin parmi les cadavres.
– Je m'en suis déjà occupé.
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